Le Rire des Dieux
Recueil de poèmes épiques
« I – LES COLOSSES »
L’ATLANTIDE (septembre 1932) « I »
En ces temps-là, sur les abîmes multiformes,
Où l’océan roule ses vagues éblouies,
Un continent incendiait ses forêts d’ormes
Sous les aurores d’or qui jamais ne s’endorment
Et de ses vastes lacs illuminait les nuits.
Des montagnes, ivres de flamme et de vertige,
Dressaient dans l’éternel firmament, leurs glaciers
Où les nuées miraient des tournoyants prodiges ;
Et les volcans jetaient leurs flamboyantes tiges
Que nimbaient les vapeurs de corolles d’acier.
Ce monde était le fils de tes glauques entrailles
Ô mer ! Un souverain soleil le dévorait,
Mais les nues, à la fois visions et murailles,
Amortissant les grands rayons que rien n’éraille,
Faisaient du jour splendide une ombre mordorée.
Dans cette ombre vivaient des formes grandioses
Qui s’épanouissaient parmi l’immense horreur :
Des tigres chevelus, des cèdres pleins de roses,
Et de puissants dragons, tendant leur aile éclose
Dans la foudre, au-dessus des monts dominateurs !
L’univers bouillonnait de forces fécondantes,
La stature de l’Être étalait sa grandeur ;
Et des hommes titans, des géantes ardentes,
Aux veines consumées de pourpres corrodantes,
Couvraient plaines et monts d’un tourbillon rôdeur.